Dans le Nord du Maroc, de nouveaux appels à légaliser le cannabis

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Revue de presseKiosque360. Les militants et acteurs associatifs sont de plus en plus nombreux à appeler à la légalisation de la culture du cannabis dans le Nord du Royaume.

Le 22/12/2020 à 16h53

Comme il fallait s’y attendre, le retrait par les Nations Unies du cannabis de la liste des stupéfiants a relancé le débat autour de sa légalisation au Maroc. Aujourd’hui, ce sont des voix de militants qui s’élèvent pour défendre le droit des agriculteurs du Nord à vivre de la culture de cette plante.

Dans son numéro du mercredi 23 décembre, Al Ahdath Al Maghribia écrit que les appels se multiplient, ces derniers jours, pour légaliser la culture du cannabis dans certaines régions du Nord du pays, surtout au regard de son apport social aux communautés locales. Les militants associatifs sont, en effet, de plus en plus nombreux à appeler à mettre en place une réglementation permettant d’organiser cette filière et, surtout, de cesser de considérer les agriculteurs qui en vivent comme des «hors-la-loi». Ces militants s’appuient sur plusieurs évidences pour appuyer leurs arguments.

La première, d’après ce que rapporte le journal, est liée à l’histoire même de la culture du cannabis dans le Nord, et particulièrement dans le Rif. Pour des villages entiers, cette culture est un héritage préservé depuis des décennies. Il s’agit, pour eux, d’un métier qui se transmet de père en fils et qui, par ailleurs, est le seul moyen de subvenir aux besoins de la famille. A ce titre, pour les agriculteurs locaux, la culture du cannabis n’est pas vraiment un luxe, mais plutôt une contrainte liée à la nature même de leurs sols. Ces derniers ne seraient, en fait, adaptés à aucune autre culture, surtout dans des régions comme Ketama, Boukhaled et autres. Des tentatives pour diversifier les cultures y ont bien été menées par le passé, mais seul le cannabis s’est avéré adapté.

Pour les défenseurs de la cause de la légalisation, il s’agit aussi d’une nécessité pour sortir les populations locales d’une situation sociale plutôt ingrate. En effet, dans plusieurs villages du Nord, les populations ont pris l’habitude de vivre, ces dernières années, en cachette, de peur de se retrouver derrière les barreaux pour un travail pourtant vivrier. La plupart de ces gens renoncent même à certains de leurs droits les plus élémentaires, comme celui d’avoir une Carte d’identité nationale ou tout document administratif dont ils auraient besoin. En effet, ils craignent de se faire arrêter en entamant des démarches administratives, ou encore de se faire «ficher». Pire encore, selon les témoignages, la peur de ces populations est tellement grande que, dans des villages entiers, on ne trouverait plus aujourd’hui d’hommes ou de garçons, tous ayant pris la fuite pour éviter le risque de se faire arrêter.

Enfin, comme le souligne Al Ahdath Al Maghribia, les militants défendant la légalisation du cannabis espèrent également que cela permettra de rétablir certaines vérités. Il s’agit principalement des répercussions financières de la culture du cannabis sur les populations locales. Contrairement aux idées reçues, les agriculteurs des régions concernées ne roulent pas vraiment sur l'or, la plupart disposant à peine des moyens de subvenir aux besoins quotidiens de leur famille. 

Pour les militants, il ne faudrait surtout pas omettre le fait que les agriculteurs sont le maillon le plus faible de la chaîne, contrairement aux grands barons qui se sont enrichis pendant de longues années en commercialisant les produits du cannabis. En plus d’être considérés comme des «hors-la-loi», ils subissent également les contraintes de la culture de cette plante connue pour son cycle de production trop long, les difficultés liées à l’irrigation dans des zones souvent montagneuses, ainsi que le coût élevé de production.

Avec la légalisation de la culture du cannabis, les militants associatifs espèrent donc que cette filière deviendra suffisamment organisée pour que les agriculteurs, et plus globalement les populations qui en dépendent, accèdent à une vie un peu plus digne.

Par Fayza Senhaji
Le 22/12/2020 à 16h53